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« Une poissonnerie à Singapour, c'est possible »

 

Stéphane Hervé,
directeur général d’Elite Fine Food

 

« Une poissonnerie
à Singapour,
c'est possible »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Implantée depuis 11 ans à Singapour, Elite Fine Food importe des produits alimentaires
haut de gamme : viande, légumes et produits de la mer. L’entreprise de cinq salariés,
dirigée par Stéphane Hervé, sert une clientèle d’une centaine d’hôtels, restaurants,
traiteurs pour les compagnies aériennes notamment et quelques particuliers.
 

 

Elite Fine Food : 2 M€ de CA - Produits de la mer traités : 400 kg/semaine

 

ZOOM sur Singapour

La consommation
de produits de la mer
22kg/an/hab

Les importations en poissons, coquillages et crustacés
193 700 t


La Chine, premier fournisseur
En 2016, Singapour a importé
pour 1,07 milliard de dollars
ou 900 millions d’euros de produits de la mer. La Chine, avec 139 millions de dollars (116 millions d’euros),
est le premier fournisseur de ce marché, suivi de la Malaisie et de l’Indonésie.

Des touristes en masse
Si la population de Singapour s’élève
à 5,5 millions d’habitants, le pays
a été visité par 16,4 millions de touristes en 2016. Cette activité a généré plus de 15 milliards d’euros de revenus. 12 % de ce montant proviennent des dépenses pour les boissons et la nourriture.


 

 

 

PdM : D’où importez-vous vos produits de la mer ?
Stéphane Hervé : De France et notamment de Bretagne, mais aussi d’Espagne et du Japon. Les contrôles sanitaires à Singapour sont très stricts, surtout sur les huîtres. Les vétérinaires français et singapouriens sont, cela dit, en étroite relation.
De France, j’achète des huîtres, de la saint-jacques, de la moule de bouchot, du bar, du saint-pierre, de la sole, de la limande et du turbot. Ce dernier peut être d’élevage, pour être servi dans des banquets ou des menus spécifiques. Sinon, la clientèle exige plutôt du poisson sauvage entier, pêché à la ligne ou au filet.
J’achète aussi de la langouste, du homard et du tourteau que je fais venir vivant.

Côté fret, comment êtes-vous organisé ?
S.H. : Les livraisons depuis la France arrivent le jeudi. Un jour clé puisque le gros de l’activité de nos clients se fait en fin de semaine. Cela suppose de pouvoir consolider les commandes chez un transitaire dans la nuit du mardi, pour optimiser la fraîcheur et limiter la casse sur les crustacés vivants. Pour moi, à 85 % je n’ai pas de mortalité.
Néanmoins cette année, nous espérons développer un second arrivage le lundi ou le mardi pour offrir plus de flexibilité à notre clientèle.
C’est d’autant plus important que la concurrence est sévère à Singapour. Le Japon y livre quatre fois par semaine, avec des opérateurs capables de faire du petit colis. Si le client veut un carrelet de 2 kg, deux rougets et trois saint-pierres, ils répondent présent. C’est un plus. La clientèle apprécie de ne disposer que des quantités dont elle a besoin afin d’éviter les pertes.

Ont‑ils d'autres attentes ?
S.H. : Nos clients veulent un produit top. Ils sont prêts à payer 3 à 5 euros de plus le kilo pour avoir une qualité irréprochable. Le produit arrive le jeudi. Il faut qu’il dure. Si ces chefs étaient en France, ils seraient livrés trois à quatre fois par semaine. Il faut aussi être réactif et avoir les calibres demandés. Pour répondre à ces attentes, nous travaillons avec plusieurs mareyeurs dont Distri Malo. Pour les huîtres, un produit qui marche très bien dans le pays, je travaille avec un seul producteur de Marennes-Oléron avec lequel j’ai une exclusivité. Nos clients ne veulent pas avoir une huître qui pourrait être distribuée en GMS. Ils aiment aussi connaître les producteurs. Les ostréiculteurs l’ont bien compris. Ils voyagent beaucoup.

À Singapour, quelle est l’importance de la RHD ?
S.H. : Les Singapouriens préfèrent aller au restaurant que de manger à la maison. Pour 5,5 millions d’habitants, il y a 9 000 restaurants avec un large choix de cuisines du monde. À tous les prix : cela commence à 1 ou 1,50 euro. Cela n’empêche pas la population de cuisiner à la maison. Pour les fêtes du Nouvel An chinois par exemple, tout est fermé, y compris les restaurants. Ils s’approvisionnent donc en grandes surfaces où on trouve du poisson. Le choix est limité. Les espèces locales et le congelé dominent l’offre. Toutefois, dans certains supermarchés japonais, vous allez trouver du très haut de gamme, très cher. Comme il existe des boucheries à Singapour, il y a la possibilité d’y ouvrir une poissonnerie pour vendre du produit frais d’importation. Je sers, du reste, déjà une clientèle de particuliers qui recherche ce type de produits. Je serais capable d’investir avec un mareyeur dans cette poissonnerie.

En 2016, le WWF a dénoncé que trois quarts des poissons consommés étaient issus de stocks en danger. Les comportements évoluent ?
S.H. : Une attention plus poussée est portée sur les poissons certifiés MSC ou Friend of the Sea. Des chaînes d’hôtels se sont engagées à s’approvisionner dans un certain pourcentage en produits certifiés. La démarche est loin, cela dit, de concerner tout le monde.

Propos recueillis par Loïc FABRÈGUES