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« La Tunisie doit se préparer pour un marché comme la France »

(Crédit photo : DR)

 

Mourad Ben Ayed,
Directeur général de Ben Ayed Seafood

La Tunisie doit se
préparer pour un marché comme la France ”

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les discussions autour des accords de libre-échange entre la France et la Tunisie divisent l’opinion, d’un côté et de l’autre de la Méditerranée. Mourad Ben Ayed est directeur général du groupe Ben Ayed Seafood, l’une des plus grosses entreprises d’exportation de produits de la mer du pays.


Ben Ayed Seafood – CA : 36 millions d’euros à l’export

 

ZOOM sur la Tunisie

Exportations de produits
de la mer en 2018

27 000 t

Exportations vers l’Espagne,
le premier marché
19,6 %

 

Exportations
Les exportations tunisiennes de produits de la mer ont augmenté de 33 % en volume et de 28,5 % en valeur en 2018, selon un rapport du ministère de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche. Les ventes s’élèvent à 158 millions d’euros. Un chiffre qui permet au pays d’augmenter l’excédent de sa balance commerciale, déjà dans le positif, à 83 millions d’euros. Les exportations de crabe à destination de l’Asie et de dorade tirent le bilan vers le haut.

Premier marché
L’Espagne est le premier marché en valeur à l’exportation pour la Tunisie, suivie de Malte (14,4 %) et de la Libye (6,2 %). La France n’arrive qu’en neuvième position (1,5 %).

 

 

 

PDM : Que représente l’export de produits de la mer dans votre activité ?
Mourad Ben Ayed : Nous exportons absolument tous les produits de la mer présents en Méditerranée, et essentiellement des crustacés. Cela représente environ 3 000 tonnes de produits de la mer à destination de l’Europe et 1 000 tonnes vers l’Asie chaque année. Le groupe dispose de sa propre flotte de 18 navires et nous nous approvisionnons aussi chez une quarantaine de pêcheurs locaux. Nos produits sont surgelés bord, ce qui assure une meilleure qualité et nous produisons aussi du frais. Le groupe pêche des crustacés comme les crevettes roses, rouges et violettes, la langoustine, l’écrevisse, le homard… Beaucoup de céphalopodes également et du poisson bien sûr.


Pourquoi ces marchés ?
M.B.A. : L’Europe est notre marché historique, c’est notre plus gros client. Nous fournissons beaucoup de produits élaborés pour les grandes surfaces en Italie, en Espagne et au Portugal. Nous disposons de cinq usines de transformation dans le pays pour répondre à la demande. L’Asie est un nouveau marché que nous commençons à développer. La Chine, le Japon, la Corée du Sud et le Vietnam sont demandeurs de produits méditerranéens, comme le crabe bleu par exemple. Mais les bons payeurs sont en Europe. Notre volume à l’export n’est pas énorme mais il est extrêmement bien valorisé.


Que changerait la signature du traité de libre-échange entre la France et la Tunisie, pour vous et pour le pays ?
M.B.A. : Le marché français est très délicat pour nous. Les produits de la mer tunisiens ont énormément de qualités qui ne sont pas forcément appréciées en France. Les acheteurs sur place donnent peu d’importance aux produits de la mer méditerranéens. Si jamais le traité de libre-échange est signé, cela va inciter les échanges entre nos deux pays. Il y a moins de cinquante entreprises de produits de la mer en Tunisie, il y a un grand potentiel de développement.


Et au niveau des importations ?
M.B.A. : Nous importons surtout des produits de la mer d’Afrique de l’ouest : Mauritanie, Sénégal, Maroc, à destination du marché intérieur. Une filiale du groupe s’occupe de fournir des produits de la mer pour les cantines scolaires, les foyers, l’armée… Depuis la France, nous importons les naissains d’huîtres pour notre ferme d’élevage située à proximité de Bizerte, au nord de Tunis.


Comment pouvez-vous valoriser vos produits sur le marché français et répondre à une forte demande ?
M.B.A. : Nous disposons d’un label naturel car nos produits sont plus goûteux que ceux pêchés en Atlantique par exemple. La Tunisie se caractérise par ses golfes et estuaires très riches. Nous maîtrisons toute la chaîne de la pêche à la transformation puis l’exportation. Par ailleurs, la pêche tunisienne ne fonctionne pas comme en Europe. Nous sommes bien sûr tenus de respecter les repos biologiques de chaque espèce et notre espace marin est divisé en trois zones, mais nous n’avons pas de quotas sur les espèces. Seuls les thoniers sont soumis aux réglementations de l’Iccat. Pour l’instant, nous n’avons pas d’excès de production, le marché est très demandeur et il est déjà difficile de satisfaire tout le monde.

Propos recueillis par Guillaume JORIS