5 QUESTIONS À YVES GUIRRIEC, ASSOCIATIONS HALLES À MARÉE
" Nous devons être ouverts à l'expérimentation de nouvelles formes de commercialisation."
Directeur de la criée de Lorient depuis 2004, Yves Guirriec a été nommé en juin à la présidence de l’association des directeurs de halles à marée, succédant à Yves Herszfeld. À 49 ans, Yves Guirriec s’est déjà investi dans les criées de Concarneau, Quiberon et Royan après une courte carrière d’enseignant. Il en a gardé le sens de la pédagogie.
1 . Après plusieurs années à la tête de l’association des directeurs de halles à marée, Yves Herszfeld vous a transmis le témoin. Comment envisagez-vous votre rôle et celui des criées ?
2 . Le développement des circuits courts ou des systèmes de contractualisation ont-ils fragilisé les criées ?
3 . La prévente exige que les producteurs donnent de l’information en amont. Les mentalités changent-elles ?
4 . Quelles sont les autres pistes de valorisation ?
5 . Quel regard portez-vous sur l’année 2012 ? Et quels sont vos enjeux 2013 ?
INTERVIEW
Question 1 . Après plusieurs années à la tête de l’association des directeurs de halles à marée, Yves Herszfeld vous a transmis le témoin. Comment envisagez-vous votre rôle et celui des criées ?
Les présidents de l’association doivent assurer une présence auprès des acteurs de la filière, de ses représentants et des institutions pour conforter le rôle des halles à marée.
Les criées sont les lieux où la mise en marché des produits de la mer est la plus transparente et la plus loyale. Loyale car acheteurs et producteurs sont connus, transparente car nous rendons des comptes statistiques aux acteurs de la filière pour leur donner plus de visibilité.
Le rôle de la criée ne saurait être limité à celui d’un lieu de débarques où offreurs et acheteurs se croisent. Les halles à marée doivent explorer toutes les méthodes et techniques pour valoriser les productions débarquées. À voir les taux de retraits se réduire chaque année, de nombreux efforts ont déjà été consentis.
Question 2 . Le développement des circuits courts ou des systèmes de contractualisation ont-ils fragilisé les criées ?
Pas vraiment. Mis à part l’initiative M3, peu d’acteurs se sont engagés dans la contractualisation, dont l’objectif visait à lisser les cours de certaines espèces sur une période définie. Ensuite, les circuits courts ont eux aussi montré leurs limites. Ils ne peuvent absorber toute une production ni apporter suffisamment de valeur ajoutée pour absorber les hausses de prix du gasoil. Mais lorsqu'ils sont apparus, ces systèmes ont forcément interpellé les gestionnaires de criées. Ces derniers ont lourdement investi pour que les transactions se fassent en conformité avec les dispositions réglementaires, il était juste que tous ceux qui en profitaient y contribuent.
Pour autant, cela ne veut pas dire que les enchères doivent rester l’unique modèle de commercialisation. Nous pouvons comprendre l'intérêt de la contractualisation. Mais si nous devons être ouverts à l’expérimentation de nouvelles formes de commercialisation, nous devons rester un partenaire pour continuer d’organiser la mise en marché dans la transparence. C’est primordial. Aujourd’hui, les criées s’ouvrent de plus en plus aux systèmes de vente en gré à gré, à la prévente…
Question 3 . La prévente exige que les producteurs donnent de l’information en amont. Les mentalités changent-elles ?
Tout le monde prend conscience que la première piste à emprunter pour bien valoriser les produits est de permettre aux marchés d’anticiper. Les acheteurs sont présents dans plusieurs criées et n’ont plus le luxe d’attendre les surprises. Ils se couvrent ailleurs. Aujourd’hui, la collecte des informations en amont, au niveau national, est bien faite par l’OP de l’île d’Yeu. Bien sûr, des progrès restent à faire, notamment pour collecter les données à bord des bateaux, mais les choses bougent.
Question 4 . Quelles sont les autres pistes de valorisation ?
La vente à distance en est une. Elle deviendra d’autant plus importante que les acheteurs disposeront de suffisamment d’informations pour acheter les yeux fermés. Toutes les criées expérimentent des systèmes ou des méthodes de travail pour affiner et mieux définir les critères de qualité (tests olfactifs, notation de 0 à 19, externalisation…). Il est trop tôt pour tenter d’harmoniser les nouveaux critères définis, mais c’est un sujet que nous évoquons.
Ensuite, les criées doivent proposer des services qui répondent à une vraie demande des acheteurs ou des producteurs pour permettre de valoriser de nouvelles espèces, en les présentant différemment. À Lorient, nous avons investi dans une machine à fileter ; ailleurs, des directeurs ont opté pour une machine de conditionnement ou un centre de purification des coquillages. C’est important.
Question 5 . Quel regard portez-vous sur l’année 2012 ? Et quels sont vos enjeux 2013 ?
Au niveau des apports, mis à part en Méditerranée, les volumes sont restés stables. En revanche, nous avons constaté une baisse de la valeur d’environ 3 %. La conjoncture économique, notamment en Espagne ou en Italie, l’explique en partie. Pour les poissons blancs, les cours ont forcément été impactés par le retour de certains stocks, comme ceux du cabillaud de Norvège.
Difficile de prédire ce que sera 2013 en termes de volumes, mais l’année sera charnière puisque les criées vont devoir investir dans la mise en place du règlement contrôle qui nécessite la collecte et la transmission de plus d’informations.
Propos recueillis par C.ASTRUC
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