Prix de l’huître, la bouteille à l’encre
Prévoir les cours ostréicoles est un art difficile, surtout quand les mortalités génèrent du sur-stockage. Mais la tendance à la baisse des prix favorise la consommation.
Le retournement des prix de l’huître en 2015, après une forte hausse entre 2011 et 2015 suite aux mortalités de naissain, était-elle prévisible ? Oui, répondront ceux qui détiennent toutes les composantes du marché… et ils ont bien de la chance ! Sauf qu’on les compte sur les doigts de la main, tant l’offre est disséminée et le nombre d’intervenants élevé. « Naisseurs, écloseurs, producteurs de demi-élevage et/ou d’huître commerciale, courtiers, grossistes, expéditeurs… Une multitude d’opérateurs compose la filière ostréicole. Un jeu d’acteurs s’opère avec des distorsions d’information qui vont avec. Le tout dans un marché très franco-français soumis à une forte saisonnalité, avec 70 % des ventes à Noël », rappelle Véronique Le Bihan, économiste à l’université de Nantes.
Difficile à appréhender, l’offre est étroitement liée à celle des stocks. Or, les mortalités influencent directement les comportements : « Le sur-ensemencement et le surstockage pour compenser les pertes dépendent du niveau de risque apprécié par chacun. Mais cela déstabilise la mise en marché au moindre pic. Les cours deviennent alors très volatils tant que les stocks ne sont pas résorbés », explique Jacques Sourbier, président du comité régional de la conchyliculture des Pays de la Loire. Le manque d’informations à la production est un frein à la mise à prix « et à toute tentative de modélisation », ajoute Véronique Le Bihan.
« En fait, les clients ont une meilleure vision du marché que les producteurs, considère Arnaud Delangle, directeur général de Cultimer France. L’hiver dernier, la distribution a joué le jeu. Et la forte élasticité de la demande par rapport au prix a permis de compenser en volume la baisse des prix de 25 %. Mais la baisse n’est pas forcément nécessaire à Noël, période où le consommateur est moins sensible aux prix, contrairement au reste de l’année. »
Autre constante : les écarts de prix de revient à la production sont très élevés et l’offre très segmentée. Cela se traduit par une échelle de prix de vente allant de 1 à 4. Ces dernières années, les enseignes ont renforcé leur offre haut de gamme. Dans la conjoncture actuelle, la tendance baissière sur les huîtres devrait convaincre d’autant plus facilement les consommateurs que le foie gras et le saumon fumé seront beaucoup plus chers en 2016.
Bruno VAUDOUR
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