Année charnière pour les pêcheurs français de coquilles Saint-Jacques
Impact du Covid-19 sur la demande et conséquences maritimes du Brexit : en Normandie comme en Bretagne, les pêcheurs de saint-jacques sont à un tournant.
4 500 t |
La saison des coquilles Saint-Jacques qui vient de s’ouvrir le 1er octobre restera, à bien des égards, comme une saison très particulière pour les pêcheurs hexagonaux. Il y a d’abord l’effet des mesures sanitaires liées à l’épidémie de Covid-19 sur la demande. Fin août, rien n’indiquait qu’une reprise des contaminations n’allait pas, de nouveau, venir peser sur les achats des consommateurs, en particulier pour les saint-jacques fraîches proposées en poissonneries ou dans les restaurants. « La saint-jacques est un produit festif, commente Dominique Lamort, responsable qualité à Normandie Fraîcheur Mer. Les mesures sanitaires peuvent se ressentir sur l’envie d’en consommer : avec l’obligation du port des masques, on est moins tenté de flâner en ville, on entre au compte-gouttes sur les marchés… » En outre, à l’image du festival des coquillages de Granville, plusieurs manifestations, qui sont autant de temps forts promotionnels, ont été annulées. Si le début de saison venait à être marqué par des ventes en berne, les professionnels pourraient être amenés à prendre des mesures afin de diminuer les apports pour ne pas engorger le marché durant les premières semaines. Concernant la ressource, les organisations de pêcheurs ont le sourire. Les niveaux de biomasse sont rassurants. En Bretagne, l’an passé, une capacité de 4 500 tonnes avait été fixée pour les deux saisons à venir. Sous réserve que les comptages attendus fin septembre donnent satisfaction, la baie de Saint-Brieuc s’apprête donc à repartir sur les mêmes bases. En baie de Seine, la traditionnelle campagne Comor de l’Ifremer a pour sa part été décalée à septembre. Dans l’attente des chiffres, les pêcheurs normands n’en étaient pas moins optimistes, s’appuyant sur les deux records de biomasse enregistrés lors des dernières saisons. Soucieux vis-à-vis de l’évolution du marché, optimistes quant à l’état de la ressource, les pêcheurs en Manche sont en revanche davantage dans l’expectative quant aux conséquences du Brexit. Tout d’abord, la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne va de facto rebattre les cartes en termes d’accès aux zones de pêche. Et pour les coquilliers bretons ou normands, un éventuel partage des eaux au milieu de la Manche au 1er janvier 2021 pourrait avoir un impact considérable sur l’exploitation de la ressource. En effet, c’est dans le sud de la Manche que les gisements sont les plus prolifiques. De ce point de vue, les pêcheurs de coquilles seront en situation beaucoup plus favorable que leurs compatriotes pêchant d’autres espèces, pour certains à 70 % dans les eaux britanniques. Même si les filières bretonnes et normandes pourraient, à première vue, se réjouir de cette nouvelle donne, le dossier saint-jacques n’est que l’un des volets d’un contexte de Brexit évidemment beaucoup plus global. D’ici le 1er janvier, il y a trois mois de campagne. Trois mois qui pourraient s’avérer de nouveau tendus en mer entre équipages français et anglo-saxons à l’approche de la date fatidique. Mi-août, les négociations n’avaient pas encore abouti. « Le risque, faute d’accord, expliquait en août Manuel Evrard, directeur de l’Organisation des pêcheurs de Normandie, est de voir toute la flottille britannique se présenter en masse… ». Bertrand GOBIN |
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