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À Boulogne, climat électrique…

Les relations entre mareyeurs boulonnais et pêcheurs locaux sont loin d’être un long fleuve tranquille. En ce début d’année, la pêche électrique entraîne des tensions.

Pour les fileyeurs boulonnais, la sole est l’espèce phare. (Crédit photo : B.L.)

 

Plus de 100

Le nombre d’unités pratiquant la pêche électrique en mer du Nord en 2017, au titre de l’expérimentation. Dont 84 aux Pays-Bas.

 

 

Les artisans boulonnais, qui tirent une grande partie de leur revenu de la sole, sont victimes d’une diminution de la ressource imputée à la pêche électrique pratiquée par les Néerlandais. En se mobilisant, aux côtés de Bloom, des élus et de l’opinion publique, ils ont décroché l’interdiction totale de cette pratique par le Parlement européen le 16 janvier, à Strasbourg. Reste à en obtenir l’application le plus rapidement possible. La pression est montée, avec des actions spectaculaires comme le blocage du port de Calais et de la gare de marée de Boulogne, au grand dam des autres acteurs économiques.

Capécure, le hub européen des produits de la mer avec plus de 5 000 emplois, n’a pas apprécié le blocage de la gare de marée de Boulogne par une cinquantaine de marins pêcheurs en colère fin janvier. La semaine suivante, les mareyeurs ont manifesté leur grogne en délaissant le poisson des trémailleurs. La sole – espèce la plus valorisée à la criée de Boulogne – n’a pas trouvé preneur pendant plusieurs jours. Ils ont également adressé une lettre ouverte au président de la République, au gouvernement, aux parlementaires et élus territoriaux, intitulée « Non à l’action irresponsable des zadistes de la mer ». Pour le président du mareyage boulonnais Joël Pichon, « il n’est pas normal que quarante personnes paralysent 5 000 autres qui travaillent ».

Au-delà du mareyage, les écoreurs, les industriels de la transformation, les logisticiens, les transporteurs et les GMS ont souhaité alerter les pouvoirs publics face à cette « prise en otage ». Certaines enseignes, qui n’ont pu être livrées, ont même déréférencé la sole boulonnaise.

De leur côté, les fileyeurs ont des griefs contre les acheteurs de la criée. Certains pêcheurs se sont tournés vers la Coopérative maritime de Dunkerque. « À 80 km de Boulogne, nos collègues vendent leur poisson 1, 2 ou 3 euros plus cher au kilo », explique Stéphane Pinto, le représentant de la pêche côtière boulonnaise. « Ils ont le droit de vendre leur poisson où ils veulent, mais ce n’est pas nous qui fixons les prix de marché », répond le directeur du service des pêches à Boulogne.

Conscientes du problème, les autorités ont commandité de nombreuses études. Le Conseil général de l’environnement et du développement durable, le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux, le Comité national des pêches maritimes et, très récemment, le sous-préfet Jean-Philippe Vennin ont tour à tour préconisé une série d’actions pour renforcer l’attractivité de la criée boulonnaise.

Benoît LOBEZ

La sole devancée par l’encornet

Souvent en tête du classement des ventes en criée de Boulogne, la sole a perdu beaucoup de terrain en 2017 par rapport à l’encornet (ou calmar). Avec un produit de 21 millions d’euros – au lieu de 11 millions en 2016 – pour plus de 3 000 tonnes, le céphalopode est devenu l’espèce phare du port. Non soumise à quotas, celle-ci contribue grandement au chiffre d’affaires des entreprises d’une autre flottille, les chalutiers artisanaux étaplois.
Les chiffres de 2016 et de 2017 traduisent bien les craintes des Boulonnais qui pratiquent la pêche au trémail. Même si l’explication n’est pas scientifiquement établie, les apports de sole s’effondrent : 1 021 tonnes en 2014, 733 tonnes en 2015, 526 tonnes en 2016, 420 tonnes en 2017, pour un prix moyen de 10,66 €/kg. « Avant la pêche électrique, on vivait bien de notre métier, se lamente Stéphane Pinto. Maintenant, on pêche deux fois moins de sole qu’il y a cinq ans. »

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